Untitled, 2019

Le motif d’Untitled, 2019, est emprunté au livre d’artiste que Rudolf Stingel a publié en 1989 sous le titre Mode d’emploi. À l’aide de photographies, il y explique pas à pas, en six langues, la fabrication de ses oeuvres abstraites. Une des dernières étapes du processus est la projection, avec un aérographe, d’une couleur argent sur une toile enduite de peinture à l’huile et recouverte de tulle. Mode d’emploi fournit au lecteur les moyens de réaliser lui-même une oeuvre à la Stingel, tout en lui faisant prendre conscience de l’ambivalence entre un original et sa copie. Les peintures photoréalistes de Stingel sont toujours le résultat d’une opération de traduction. Une image existante, en l’occurrence une photographie en noir et blanc dont l’artiste a lui-même passé commande, est transposée dans un autre médium, ici une peinture de grand format. Dans le cas présent, la transformation est particulièrement éloquente : l’aérographe, l’outil du peintre, est peint et la toile qu’on peut voir sur la photographie de Mode d’emploi est agrandie et retraduite en une véritable toile.

Untitled, 2013

Au centre du tableau, un renard roux peint de façon réaliste, immobile dans un paysage de neige. L’image qui a servi de modèle à cette oeuvre provient d’un vieux calendrier allemand, chaque semaine montre un animal dans son environnement naturel. D’une facture picturale subtile, Untitled, 2013, reproduit avec minutie le document photographique de départ et en reprend tous les défauts. Cette oeuvre fait partie d’une série pour laquelle Stingel a peint, dans un format carré identique, d’autres animaux de ce même calendrier – une chouette, un pic et un sanglier, appartenant tous à la faune des Alpes. Le renard est une figure familière, il apparaît dans quantité d’histoires, qui vont des récits mythologiques et des contes de fées jusqu’aux associations les plus subjectives.

Untitled, 2015

La bouche grande ouverte, les orbites creuses, les bras projetés en l’air dans un geste d’horreur ou d’épouvante, une figure spectrale fixe le spectateur droit dans les yeux. Elle est enveloppée dans un drap blanc qui suggère à la fois la présence et l’absence. L’artiste est parti de l’image d’une vieille marionnette qu’il a transposée en peinture. Il a étendu ensuite la toile peinte sur le sol de son atelier, pour l’exposer aux influences les plus diverses. Les surimpressions dynamiques à la surface du tableau font voir le caractère processuel d’un travail artistique qui se joue des barrières entre figuration et abstraction.

Untitled, 2012

Les peintures exposées dans cette salle ont vu le jour à la faveur d’un processus aux multiples strates – une méthode artistique que nous rencontrons sans cesse chez Stingel. Dans cet ensemble d’oeuvres, le motif Serapi d’un tapis persan a été transposé à la peinture à l’huile et à l’émail sur une toile dont la surface était déjà recouverte de plusieurs couches de peinture. En plus du caractère processuel de la fabrication, ce qui apparaît ici, c’est la manière typique dont Stingel travaille en séries. L’artiste ne s’intéresse pas à l’oeuvre en tant que telle, dans son unicité, il produit au contraire, autour d’un même motif, toute une série de travaux qui se rattachent les uns aux autres. Le motif choisi peut réapparaître sous différentes versions. En l’occurrence, ce dessin Serapi n’a pas seulement été utilisé pour cet ensemble de peintures, on le retrouve dans d’autres phases de travail, où il se superpose à des motifs photoréalistes comme des portraits ou des paysages.

Untitled, 2010

Pour ses tableaux de paysage, Rudolf Stingel se sert souvent de photographies trouvées, historiques, dont il reprend les propriétés matérielles lorsqu’il les transpose en peinture. Sur ce tableau d’un sommet des Alpes du Sud-Tyrol, on reconnaît ainsi, en plus du soin apporté au rendu des détails, la poussière et les rayures qui ont altéré la surface de l’image photographique originale. Traces et souvenirs tiennent un rôle central dans le travail de l’artiste, iIs témoignent d’une préoccupation d’ordre autobiographique et d’une volonté d’explorer des phénomènes à la fois conscients et inconscients. La dynamique du contrôle et du hasard devient, en tant que telle, le sujet que l’artiste explore par le biais de la peinture.

Untitled, 2010

Les trois peintures rayonnant d’un éclat d’or mat font apparaître ce processus de création complexe, par exemple dans la juxtaposition des zones claires et des parties sombres, des endroits travaillés et non travaillés de la toile. Il en résulte des paysages qui, à la fois très concrets et tout à fait abstraits, acheminent le regard vers un espace perspectif.

Untitled (After Sam), 2006

Au mur de cette installation spatiale composée de tapis (voir texte 13) est accroché un gigantesque portrait de l’artiste, à la fois mélancolique et solennel. De très grand format, il impose sa présence comme un écran de cinéma. Rudolf Stingel y pose comme le héros d’un film. Plus qu’un autoportrait, c’est la minutieuse reproduction en peinture d’une photographie prise par son ami Sam Samore, ce qui explique le sous-titre de l’oeuvre, After Sam.

Untitled, 2018

Dans Untitled, 2018, le motif agrandi d’un champ de fleurs s’étend sur trois panneaux, en adoptant la forme classique du triptyque. Le regard flâne à travers le somptueux paysage pictural de roses et de pivoines roses, de marguerites et de lys blancs, de chrysanthèmes bleus et de coquelicots rouges. Le rythme de cette peinture se fonde sur une reproduction photographique d’un papier peint du milieu du XIXe siècle.

SOUND INTERVENTION PAR ANTONY GENN, MARTIN SLATTERY ET JOHNNY TOMLINSON

Dans le cadre de l’exposition Rudolf Stingel, les compositeurs et interprètes britanniques créent une ambiance unique de sons électroniques faisant écho aux œuvres de l’artiste. Sound Interventions dans le hall 5 à 13 h / 15 h / 17 h

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